Francisco de
Goya
Lettres à
Martin Zapater
Traduites par
Danielle Auby
alidades 1988 (hors collection),
14,5 x 22,5 cm, broché, couture fil, non massicoté,
composé sur linotype.
168 pages, 17,00 , ISBN
978-2-906266-06-3
Première traduction française de l'intégralité des lettres de Goya à son ami Martin Zapater : un document irremplaçable.
1775-1799 : vingt
et quelques années de lettres, de l'ami à l'ami. On n'y
trouvera sans doute pas de subtiles considérations sur l'art ou
les affres de la création, non plus que sur la place de
l'artiste dans le monde. C'est que dans cette correspondance Goya
n'écrit pas pour la postérité. Aussi est-il question de toros,
de chasse, de chocolat et de tourons dont le peintre est friand,
d'argent, et même d'un lit qu'il faut démonter pour lui faire
traverser l'Espagne à dos de mules. Et d'un étrange
chapeau-candélabre que Goya s'est fait fabriquer pour pouvoir
peindre quand le jour est tombé...
Ces lettres sont la sarabande écrite d'une vie qui sans cesse
déborde, la terrible et émouvante gesticulation d'un personnage
hors du commun. Bourrades, apostrophes, jurons, dénégations,
jeux de mots et petits dessins : les phrases de Goya sont comme
un théâtre de mimiques, grave parfois, et naïf, jubilant
souvent, et même truculent.
Souvent citées, ces lettres n'avaient jamais été traduites en
français : c'est que la langue de Goya, aux antipodes de
l'académisme, n'est pas de tout repos. Danielle Auby, auteur
chez Flammarion d'un roman consacré à la vie de Goya (Les
maisons du sourd), a voulu relever le défi.
Extraits :
Madrid,
7 octobre 1778
en haut de la
lettre une question de Zapater :
Seigneur Goya,
alors, il est vivant le démon, votre majesté ou il est
mort?
Goya répond
sur la même feuille :
Je vis, je vis, pour te servir, âme de merde! Je
sais que tu vas bien par les lettres des toreros. Mais tu
dérailles! ne pas aimer Romero autant que Castillanes!
Pourtant, c'est toi qui dis les choses les plus justes
parmi ceux qui écrivent à Francisco. Ces lettres ont
bien fait rire à Madrid. C'était comme si nous ne
savions rien, elles venaient nous décrire tous les
détails avec un sérieux de notaire. Allez, allez,
petit, vous êtes tous des bourriques! Et, bon Dieu, vive
Castillanes. Il n'a pas besoin de notaire, lui! Je
rigole, je rigole, ah, ah, ah,
ah...........................
Fais pareil, mon vieux! On dit que la dotation
faite à l'Académie est arrivée et qu'elle se monte à
quarante mille réaux. Espérons qu'ils seront bien
employés! Adieu ; je suis toujours le même. Bien à
toi.
Francisco
de Goya
Mon
ami, mon ami, mon plus qu'ami Zapater
Madrid, 29
août 1781Mon
cher petit Martin
Aujourd'hui rien de neuf à te dire, je travaille
simplement au brouillon de Saint François, aussi, je me
tais, toi aussi quand tu vas tuer à la chasse, tu te
tais. Sais-tu que la montre en or que j'avais perdue il y
a deux ans en chassant, je l'ai retrouvée, elle est là
dans ma poche. Tu pensais que tous les travaux que
j'aurais à faire seraient "saragossiens" (1),
ah bien pas du tout, maintenant, j'ai l'impression de
naître à un autre monde. Et crois-moi, si j'ai envie
d'une chose dans ta petite chambre c'est de son habitant
et d'être avec lui, et de petites broutilles à six ou
sept heures de l'après-midi. Allez, ça suffit
maintenant, petit garçon, adieu.Ton
Francisco de Goya
(1)
allusion aux mauvais jour de Zaragosse, qui à eux seuls
désignent tous les revers, toutes les humiliations.
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