Desmond Egan
Élégies
Holocauste de l'automne
Famine
Élégies
Bilingue, traduit
de langlais (Irlande) et présenté par Bruno Gaurier
en couverture, peinture dAlain Saey
alidades 2000,
collection bilingues,
15 x 22 cm, broché, 192 pages,
20,00 , ISBN 978-2-906266-40-7
ouvrage publié avec le
concours du Centre National du Livre (Paris)
et du Fonds pour la
Traduction de Ireland Literature Exchange (Dublin).
Résignation,
révolte, espérance, sérénité, compassion : Desmond Egan est
un poète dans le siècle, et cest de son temps quil
parle, en mesurant le tragique, avec toujours dans la voix
quelque chose qui est de lordre de la tendresse. Etres et
choses passent, cest le propre de la parole élégiaque que
de venir nous le rappeler : mais Egan sait, par une écriture
dont la simplicité nest quapparente, nous convier
dans lintimité de ceux quil continue daimer ou
dadmirer et leur rendre cette présence par laquelle, avec
ou malgré nous, peut se dire la réalité de ce monde que nous
habitons, où trop souvent lon «torture et triture
lhomme».
Installé près de Newbridge, Desmond Egan est né à Athlone en
1940. Fondateur en 1972 de la Goldsmith Press, il est
lauteur dune quinzaine de recueils de poésie,
dune traduction dEuripide ainsi que
duvres en prose. Son travail littéraire lui a valu
des distinctions telles que The National Poetry Foundation of
U.S.A. Award en 1983, le prix de lUniversité dOsaka
en 1986, the Farrell Literary Award en 1988, ou le Pilgrims
Progress Prize de Stanford en 1993. Ses recueils ont été
traduits en néerlandais, japonais, italien, allemand et
français (Terre et Paix, P.U.L. 1988 ; Holocauste
de lautomne, Alidades 1998)
Extrait :
sans
charre sil connaissait une ou
deux choses
mon père je men félicite nétait pas un
intellectuel
lisait-il les journaux il allait droit au sport
un point cest tout
donc pas
question pour lui simple citoyen de descendre
aucun boulevard du Paradis en tête du cortège des
Aquinas Eriugena Simone Weil Nietzsche mes compagnons
ne voyant pas plus loin
que sa tasse de thé du tout du toutil
naurait pas non plus tout droit bondi sur le coin
des poètes
sans parler du respect quil vouait à tout gagnant
Y compris en course à la brouette ainsi
Shakespeare Pessoa Akhmatova Hopkins Machado and Co
pouvaient toujours causer à cent lieues de ses soucisje dois
admettre quaussi bien il évitait
Emmet et Tone et Padraic Pearse
Parnell Davitt Dev Bobby Sands et autres ce
dont personnellement je ne puis me réjouir
mais plaise ou non cétait tout lui
et la politique vraiment nétait pas son fortla musique
non plus mis à part un coup dil
à John McCormack quil connaissaitdécidément
il délaissait lÉlysée de leurs bocages
pour le coin où Kerrigan Joe
OMeara Tommie Kilroy
Artie Brock Dan Maher Jim Higgins Packie et les autres
buvaient du thé en jasant sur Athlone
ou il se
baladait avec Muscles et Dinny Hannon
et discutait football
Holocauste de lautomne
Bilingue, traduit
de langlais (Irlande) par Jean Poncet
alidades 1998,
collection bilingues,
14,5 x 21 cm, broché, 32
pages, 4,80 , ISBN 978-2-906266-28-5
Holocauste
de lautomne, dans sa dénonciation de
loppression coloniale, fait de Desmond Egan
lhéritier des grands poètes nationaux irlandais. Mais
léclairage particulier quil apporte à
lhistoire de son peuple, la surimposition du destin de
celui-ci à celui du peuple juif victime de la Shoah, la
référence à la purification ethnique, dernière appellation
dune pratique que le monde sétait plu à croire
définitivement révolue, tout cela inscrit cette suite poétique
dans une parole politique résolument contemporaine.
On trouvera
des poèmes de Desmond Egan dans la passionnante et trilingue
(anglais, gaélique, français) Anthologie de la poésie
irlandaise du XXème siècle publiée sous la direction de
Jean-Yves Masson (Éditions Verdier, 1996, 784 pages)
Extrait :
en
Irlande aussi
il est des lieux où nul oiseau ne chante
où le
passé envahit le présent
où les
siècles frémissent dans une feuille
où les
errants croisent les errants
où une
âme divisée et confinée ne cesse
dexercer notre oreille à entendre
ce
concert de tristesse qui monte
de derrière tous les murs barbelés
*
sauvez
un être cest un monde que vous sauvez certes
mais tuez-en un et
en toute chose quelque chose disparaît
cest
pourquoi nous qui avons perdu
les provinces de lespoir
qui avons eu notre holocauste en
lan de disgrâce 1847
tous
ces siècles dexil
dans notre propre pays
ces massacres trop nombreux à rappeler
nous
avons dans le sang une tristesse
une démarche une manière un accent
une sorte de rythme amer une ombre blessée
nous portons comme vous
notre humour en bandoulière
avec le
sentiment davoir tous perdu
une part de ce que nous aurions dû être
Famine
Bilingue, traduit
de langlais (Irlande) et présenté par Bruno Gaurier
alidades 2016,
collection Irlande 21
14,5 x 21 cm, 44
pages, 5,50 . ISBN 978-2-919376-43-8
Ces poèmes reviennent sur le thème – le traumatisme – de la grande famine qui au milieu du XIXème siècle, conjuguée à la politique féroce menée par l'Angleterre dans le pays, a conduit près de deux millions d'Irlandais à l'exil et a fait un million de victimes, emportées par la faim, le froid, les maladies.
Il y a de ces choses qui ne s'oublient pas, et qui finissent par s'inscrire dans l'identité d'une nation. Comme il en a l'habitude, Desmond Egan, dans une suite de dix poèmes (et un épilogue) à l'écriture directe, voire rugueuse, mêle les temps et les angles de perception : le tout constitue alors une sorte de prière compassionnelle tout autant qu'un cri de colère recommencé, dans la tonalité et l'esprit de Holocauste de l'automne.
Extrait :
“la puanteur de la famine
reste accrochée aux ronciers
aux tristes haies celtiques
ça monte au nez
du creux de nos terres
ça laisse un goût dans tous les plats
écoute
la famine dans nos musiques
la famine au fond de nos visages
juste à un pré de là
qui de nous tous a fait des migrants
coupables d’avoir survécu
(...)”
Famine a paru en Irlande en 1997.
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