Francis Coffinet
• Épreuves chamaniques (2006)
• L'argile des voyous suivi de J'incise le défi (2008)
• La nuit triangulaire (2014)
• Voyageurs des sept songes (2014)
• Contre le front du temps suivi de Une aiguille dans le cœur (2019)
• Nos cauchemars sont calmes comme des oiseaux endormis (2024)
Acteur, poète et plasticien, Francis Coffinet a publié une vingtaine de livres à ce jour et a participé à de nombreux livres d’artiste, notamment avec les peintres et graphistes Jean-Pierre Thomas, Thérèse Boucraut, Jérémy Chabaud, Frédéric Benrath, Gérard Serée, Wanda Mihuléac, Giusto Pilan, Danielle Loisel. Il collabore à de nombreuses revues en France et hors de France. Ses poèmes ont été traduits en coréen, en bulgare, en roumain, en turc, en hongrois, en allemand, en russe et en anglais.
Entretien Jean-Paul Gavard-Perret / Francis Coffinet sur Lelittéraire.com du 08.07.2024 : c'est ici.
Épreuves
chamaniques
alidades 2006,
collection Création, Quatrième tirage.
12,5 x 21 cm, 28 pages, 4,50 . ISBN 978-2-906266-66-7
J'étrangle
le feu à sa base
J'arrache
une écaille au sommeil
Je
rassemble le sel du rituel en petits tas réguliers
Pourtant
je viens vers toi
Sans
langage et sans poids
Je tranche
la brûlure en son centre
Je dévie
le méridien sur ton visage d'enfant.
Lécriture
de Francis Coffinet relève de la tension : tension entre un vers
délicat et ciselé, voire même aiguisé, et un bouillonnement
d'existence toute charnelle, qui s'impose de l'intérieur ;
tension entre une page aérée, où le silence paraît prendre
ses aises, et le flux passionné qui affleure sans cesse dans les
mots. De réussir à tenir ensemble ces mouvements en apparence
contradictoires donne à cette poésie toute sa présence de
pensée méditative, comme un grand calme dans le grain savoureux
de la vie.
L'argile des voyous suivi de J'incise le défi
alidades 2008,
collection Création. Deuxième tirage.
12,5 x 21 cm, 36 pages, 4,80 . ISBN 978-2-906266-80-3
J’ai creusé un étroit tunnel sous la vie
et je refais le voyage
le corps maintenant, comme la voix,
prend le temps de dire –
j’entre dans le rituel des moindres certitudes
nuit après nuit
pli après pli
j’écarte le combat
et j’incise le défi
“Il faut s’insinuer au plus près de la matière et du corps. Pour que la marque, la coupure, l’incision soit nette, lumineuse, définitive dans son énonciation. Le trait des mots doit être unique en son geste, à la manière du trait de la peinture d’encre japonaise. Cela, Francis Coffinet l’a érigé en style, dont le tranchant acéré est le point de rencontre et de fusion entre l’intime du corps et de la conscience et l’immense du monde et du temps. Cette écriture est singulière, non par volonté de se distinguer, mais par nécessité inhérente aux expériences vécues.” (Extrait de la postface). Ce cahier réunit deux recueils parus en 1993 et 2001 et depuis lors introuvables.
La nuit triangulaire
alidades 2014,
collection Création. Deuxième tirage.
12,5 x 21 cm, 24 pages, 4,00 . ISBN 978-2-919376-27-8
On n’explique plus rien – on dénoue
on ploie sous une seule cendre
la même musique nous accompagne depuis toujours.
On recueille la plus fine des poudres du sourire dans le creux de la main
et l’on souffle.
Francis Coffinet nous a habitués à son écriture au trébuchet, dont la si apparente fragilité ne recule pas quand il s'agit de brasser les mondes. On peut ployer "sous une seule cendre", peut-être, sans que pour autant la matière dont nous sommes constitués renonce à s'affirmer dans ses gestes de vie au cœur et au creux des forces cosmiques qui résonnent en elle. Il y a décidément quelque chose d'extrême oriental dans cette approche du réel.
Voyageurs des sept songes
alidades 2014,
collection Création.
Postface d'Arnaud Talhouarn.
12,5 x 21 cm, 24 pages, 4,00 . ISBN 978-2-919376-29-2
et l’on te sèmera dans une terre légère
une terre comme roulée sur le ventre
mêlée de gestes et de mots
et elle sera la seule à pouvoir te conter toute l’histoire.
"La terre lourde est immense et durable, mais reste muette. Les mots signifient mais sont creux, fissures au sein de la réalité qui les encercle : «J’attends / dans la faille du nom / comme un lézard dans la muraille.» Fête et défaite alternent, moments contradictoires d’une même réalité: la parole poétique n’a pas de puissance propre, elle ne fait qu’emprunter cette puissance à une réalité qui la déborde de toutes parts. Sans elle, pourtant, le monde resterait puissance endormie, informulée. Plutôt que défaite durable, et en même temps qu’une telle défaite, la parole poétique serait une passagère et presque imperceptible victoire." (extrait de la postface)
Contre le front du temps ; Une aiguille dans le cœur
alidades 2019,
collection Création.
12,5 x 21 cm, 40 pages, 5,50 . ISBN 978-2-919376-67-4
Ce recueil réunit deux poèmes publiés respectivement en 1997 aux éditions Mont Analogue et 1996 aux éditions Le Givre et l’Éclair. On y trouvera ou redécouvrira l’acuité du trait qui caractérise l’écriture de Francis Coffinet ainsi que cette tension extrême entre l’économie des moyens et la vitalité d’un propos où l’intime est en constant dialogue avec l’immensité du monde, où le front de l’homme vient se poser contre le front du temps.
"Contre le front du temps" est le cinquième titre qu’il fait paraître aux éditions Alidades.
Filaments d’a.d.n.
en perdition
dans l’apesanteur d’une identité
tirets mouvants
tatoués sur la peau
rotation des grands saules
qui bordent la rivière
glissement des angles cardinaux
j’ai fait se ruer les pliures de l’histoire –
Dans un mouvement de reins
plus prompt que la lumière
j’ai trouvé le lieu
où la vie ralentit–
angle du nez
creux de la joue
et cet infime retard
dans la courbe de l’oreille –
ce n’est pas un autre geste
qui pose le front de l’homme
contre le front du temps.
Nos cauchemars sont calmes comme des oiseaux endormis
Avec un poème dédicace de Benoît Gréan. Postface d'Emmanuel Godo
alidades 2024,
collection Création.
12,5 x 21 cm, 40 pages, 6,00 . ISBN 978-2-494935-08-2
"Un poète, c’est un monde. On le découvre guidé par rien, ou presque. Celui de Francis Coffinet est doux-étrange, fascinant-familier. Des fusées éclairent ce qui doit l’être. Laissent dans l’ombre ce qui est destiné à rester en retrait. On ne demande pas à un homme d’expliquer son secret. De présenter ses raisons.
Il y a du personnage, dans ce monde-là, mais tout le contraire d’un histrion. Un frère lointain de Plume ? Oui, mais d’une pudeur à vous faire venir aux yeux les bonnes larmes. Si ça joue ? Oui, mais parce que le jeu est parfois la seule manière de faire entrevoir ce qui ne joue pas. Ce qui ne jouera jamais : la parole d’un homme enraciné dans son destin. (...)
Des cauchemars calmes, des ombres lumineuses, des envolées immobiles, des départs qui recentrent : les poèmes de Francis Coffinet nous conduisent à un lieu profondément humain – dans les parages immédiats de nos blessures, de nos désirs, de nos amours. Car oui, « les êtres que nous aimons sont des navires de haute mer ». Il faut redire, en ces temps persistants de disette langagière et spirituelle, ces paroles qui, elles aussi, sont des navires de haute mer.
Et il faut le dire avec des mots qui aient de la gueule. Pas avec de la fadeur barattée entre le terne et le monotone mais avec de la flamboyance, du panache. Car être homme, ce n’est pas rien. La poésie de Francis Coffinet a de l’audace, la belle audace mesurée, patientée, mûrie à la confrontation des grands autres, à l’image de ce titre, admirable : « Nos cauchemars sont calmes comme des oiseaux endormis »." (Emmanuel Godo, Extrait de la postface).
• "La légèreté profonde de ce livre nous laisse comme sur le sable, à regarder le scintillement de l’eau, il y a mille ans, dans mille ans, ou maintenant." Isabelle Baladine-Howald, Poesibao III, 1.
Extrait :
La clavicule, la plaque continentale.
Nous avons plus appris à parler au brouillard qu’à ce qu’il dissimule.
Les êtres que nous aimons sont des navires de haute mer, ils passent avec lenteur, serrant la nuit contre eux – rien ne parvient à la délier de leurs corps. Seul, le verbe chante à peine plus fort que le vent et laisse sur leurs voiles sa limaille de sens.
Sang et salive ont hissé le grand mât.
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